

Sidi Ould Tah, un économiste expérimenté et discret à la tête de la BAD
Elu en trois tours avec un score triomphal parmi les pays africains, l'économiste Sidi Ould Tah est devenu jeudi le premier Mauritanien à prendre la tête de la Banque africaine de dévéloppement (BAD), où il comptera sur son expérience internationale face aux défis qui attendent l'institution.
Dernier candidat à s'être déclaré, M. Tah, 60 ans, a mené une campagne éclair pendant laquelle il a mis en avant ses dix années à la tête d'une autre institution multilatérale: la Banque arabe pour le développement économique en Afrique (Badea).
Il revendique avoir transformé la Badea, d'une institution "inconnue des agences de notation" à une des institutions de développement la mieux notée sur l'Afrique.
"J'ai prouvé mon style de leadership transformateur qui a élevé la banque au rang d'acteur de premier plan dans le paysage du développement africain", assurait-il dans sa déclaration de candidature à la BAD.
Homme discret qui parle peu, son style tranchera assurément avec celui de son prédécesseur, le flamboyant Akinwumi Adesina.
Son programme s'appuie sur 4 points cardinaux : renforcer les institutions financières régionales, affirmer l'indépendance financière de l'Afrique sur les marchés mondiaux, utiliser la dynamique démographique comme levier de développement et construire des infrastructures résilientes face au changement climatique.
Et dans son entourage on plaide pour sa capacité à reproduire ses réussites à la Badea au niveau d'une institution plus grande comme la BAD.
"La BAD doit abandonner les modèles bureaucratiques traditionnels pour une approche plus fluide et axée sur les résultats", prône le nouveau président.
- Légitimité africaine -
Cet ancien ministre de l'Economie en Mauritanie (2008-2015) plaide pour "rompre avec les approches du passé" dans un monde où les "défis et opportunités de l'Afrique ont pris une nouvelle dimension".
Polyglotte, il maîtrise aussi bien le français que l'anglais, l'arabe ou même le wolof parlé dans plusieurs pays ouest-africains.
Il a réussi le tour de force de réunir derrière sa candidature des soutiens diplomatiquement hétéroclites, des pays sahéliens comme le Mali jusqu'à la France.
Son score, plus de 72%, chez les votants africains lui assure une légitimité continentale à ce poste prestigieux. Son entourage affirmait avant le vote avoir des soutiens dès le premier tour dans toutes les régions du continent.
Face au désengagement américain - l'administration Trump va suspendre 500 millions de dollars d'aide au fonds de la BAD - M. Tah plaide pour attirer d'autres financiers, comme les pays du Golfe qu'il a bien connus à la Badea.
Sur les questions environnementales, dans un continent qui subit de plein fouet les effets du changement climatique il compte valoriser les ressources naturelles du continent pour aller vers une "transition énergétique viable, conciliant impératifs économiques et environnementaux".
"Bien que l’Afrique soit un contributeur minimal aux émissions mondiales de CO₂, elle subit de plein fouet les effets du changement climatique. Il est donc impératif d’intégrer des pratiques durables et d’exploiter les énergies renouvelables dans les projets de développement", explique t-il.
M. Tah est titulaire d'une maîtrise en économie de l'université de Nouakchott et d'un doctorat de l'université de Nice.
D.Seifert--NRZ