Biathlon: Lou Jeanmonnot, faire de son "plus bel échec" un moteur pour gagner
Se remettre d'une chute dans les derniers mètres d'une course et voir s'envoler ses rêves de titre est un art délicat. La biathlète Lou Jeanmonnot compte bien faire de son "plus bel échec" un moteur pour décrocher le gros globe qui lui échappe depuis deux hivers.
Huit mois se sont écoulés depuis Oslo, où la Franc-Comtoise de 27 ans s'est retrouvée enfermée dans l'avant-dernier virage de l'ultime course de l'hiver avant de glisser dans la neige fondue et laisser Franziska Preuss filer vers le sacre final.
"Je suis en paix avec ce qui s'est passé. Je le regarde comme le plus bel échec qui me sera permis d'avoir. Et j'en suis fière", estimait Jeanmonnot mi-novembre à Bessans (Savoie), à deux semaines de l'ouverture de la Coupe du monde.
Cette désillusion "s'est transformée automatiquement en combustible. J'ai attaqué la préparation en me disant +il ne peut plus rien m'arriver+", sourit aujourd'hui la biathlète.
Sa capacité de recul "quelques semaines à peine" après sa tragique chute norvégienne avait déjà impressionné son coach.
"Elle ne s'est pas cachée derrière le manque de chance. Elle m'a dit +j'ai aussi commis des erreurs qui m'ont amenée à me trouver dans une situation de risque+. C'est une vraie championne", encense Cyril Burdet.
Et l'entraîneur de l'équipe féminine prévient: "l'an dernier, elle a alterné avec des phases de méformes avec beaucoup d'ajustements dans la préparation. Ça ne l'a pas empêché de faire la saison qu'elle a faite. Cette année, je la sens vraiment déterminée et confiante".
- Changement de carabine -
Cette acharnée de travail, "perfectionniste" selon son père Didier Jeanmonnot, "toujours déterminée", pour sa mère Sylvane Laurent, ne veut pas se "reposer sur ses acquis".
"Parfois, quand on est si proche de gagner, on se dit qu'il manquait peut-être quelque chose et on veut passer un petit coup de balai et changer des choses", affirme la native de Pontarlier (Doubs).
Alors la N.2 mondiale a changé sa carabine pendant l'intersaison, son principal outil de travail sur lequel le moindre réglage peut modifier toutes les sensations sur le pas de tir.
"J'ai longtemps hésité car j'avais en tête que le mieux et l'ennemi du bien, donc pourquoi changer une carabine qui était déjà de très bonne qualité", explique la biathlète.
Avec 94% de précision au tir couché et 88% au debout, Jeanmonnot est la deuxième plus fine gâchette sur circuit sur l'intégralité de la saison 2024-2025, derrière Preuss (96% et 88%).
"Il fallait que je la change parce qu'elle avait une petite fissure. J'ai profité de ce changement nécessaire pour améliorer certaines choses, notamment la position des chargeurs, de la poignée, afin de gagner du temps au moment de m'installer et de recharger", précise Jeanmonnot.
- "Je peux tout faire" -
Avec des difficultés d'abord: "j'ai passé deux mois en étant assez peu sereine, avec des erreurs sur mon tir couché que j'avais du mal à comprendre", assure-t-elle.
Le travail a fini par payer puisque lors du relais féminin à Ostersund (Suède) samedi, première course de Coupe du monde, la Française a réalisé un sans-faute sur son tir couché et offert la première victoire tricolore de la saison. Dimanche, c'est le relais mixte qu'elles ont remporté, Lou Jeanmonnot faisant équipe pour les femmes avec Justine Braisaz-Bouchet.
L'objectif est de glaner de la confiance pour enfin espérer décrocher le gros globe de cristal, son rêve.
"Le gros globe a le plus de valeur à mes yeux car il récompense la régularité mais je veux aussi l'or olympique. Ca va être de la pure découverte car je n'ai aucune expérience à ce niveau-là ", se réjouit Jeanmonnot.
Pour ses premiers Jeux d'hiver de Milan-Cortina (6-22 février), la Franc-Comtoise est bien entourée avec des médaillés olympiques, comme sa coéquipière et amie Justine Braisaz-Bouchet, ainsi qu'une préparatrice mentale avec qui elle travaille depuis plus de trois ans.
Car c'est bien dans la tête que sa saison va se jouer. Elle le dit régulièrement: "je sais que je peux tout faire. Mon pire ennemi, c'est moi".
E.Weber--NRZ